La mondialisation a évidemment fait évoluer, en Asie comme ailleurs, les comportements et la façon dont on peut rencontrer un partenaire. Toutefois, les rencontres amoureuses restent dans cette partie du monde encore très marquées par des normes sociales locales, d’autant plus que les critiques envers les moyens offerts par la technologie y sont aussi présentes qu’en Occident.
L’une des méthodes traditionnelles, résistant beaucoup plus qu’en Europe, pour démarrer une relation est l’intervention des parents, de proches ou de connaissances.
Le phénomène d’intermédiation est en effet portée par plusieur facteurs.
Etre présenté est non seulement vécu comme acceptable mais parfois même attendu par les personnes concernées. Elles y voient souvent une solution à une forte timidité plus généralisée dans cette partie du monde (car acquise et reproduite par le model éducatif)
Il faut aussi noter que dans de nombreuses cultures asiatiques, la famille et la communauté jouent un rôle central dans la vie individuelle. L’idée d’autonomie individuelle est souvent moins valorisée que celle de l’harmonie collective. Par conséquent, les décisions importantes, y compris celles concernant les relations amoureuses, ne sont pas perçues comme un choix aussi intime et personnel qu’en Europe. Il est courant, par exemple, que des décisions importantes de toutes natures soient prises avec l’implication de la famille ou de l’avis de proches.
Pour beaucoup, le fait d’être présenté à un(e) prétendant(e) présente plusieurs avantages. Cela augmente la confiance en réduisant les incertitudes et les risques associés à la rencontre d’inconnus. Deuxièmement, les intermédiaires, s’ils sont bien renseignés, garantissent qu’il existe une certaine compatibilité, non seulement en termes de personnalité, mais aussi de valeurs et d’objectifs de vie. Or, le « droit à l’erreur », en testant par exemple successivement plusieurs individus pour se faire son opinion, est une option culturellement beaucoup moins acceptée en Asie. Enfin, l’approbation de la famille étant pour beaucoup cruciale, être présenté par un proche facilite parfois cette acceptation.
De plus, au-delà des avantages intrinsèques de la présentation amoureuse, l’intermédiation est aussi favorisée par un autre facteur culturel qui, à l’inverse, rend plus compliquées les rencontres sentimentales spontanées et autonomes dans des lieux théoriques de rencontre. En effet, des lieux de divertissement pourtant jugés parfaitement banals en Europe et se prêtant tout naturellement à des rencontres comme les bars ou les discothèques peuvent être jugés par une frange de la population comme des lieux de frivolité voire de débauche. S’il est éventuellement acceptable de les fréquenter en groupe d’amis pour s’amuser, flirter trop proactivement et ostensiblement avec un parfait inconnu dans de tel lieux présente pour beaucoup le risque de passer aux yeux de l’entourage ou du public pour un professionnel du monde de la nuit. Le développement malheureux et la triste existence du tourisme sexuel dans certains pays d’Asie accentue cette crainte chez beaucoup de résidents locaux. Du coup, il existe dans ces lieux un véritable jeu de rôle, un jeu de posture visant à « sauver les apparences » qui rend tout simplement plus compliqué d’y aborder une parfaite inconnue. Cette posture étant généralisée, le fait de rencontrer « trop » facilement un partenaire dans de tels lieux est donc immédiatement suspect et éveille tous les doutes possibles sur les intentions réelles de l’individu.
On le voit, la présentation via un proche était déjà une pratique plus banale et répandue en Asie et les recnontres spontanées rendues compliquées qu’ailleurs. De ce fait, la transition vers l’intermédiation professionnelle y a donc été facilitée. Elle est vécue comme moins anormale que dans les sociétés occidentales où, attendre d’être présenté par un de ses proches ou se reposer sur l’intervention d’une tierce personne peut être jugé (à tort !) comme le révélateur d’une forme d’immaturité sentimentale ou la reconnaissance d’une certaine forme de maladresse par certaines couches de la société. L’intermédiation professionnelle ou le recours à des « matchmakers » est donc une pratique beaucoup plus banalisée et acceptée en Asie.


